{"id":19633,"date":"2014-10-30T17:54:41","date_gmt":"2014-10-30T16:54:41","guid":{"rendered":"http:\/\/www.50-50magazine.fr\/?p=19633"},"modified":"2014-10-30T17:54:41","modified_gmt":"2014-10-30T16:54:41","slug":"gago-de-la-feminite-a-lultramasculinite-dans-une-societe-hypernormee","status":"publish","type":"post","link":"https:\/\/www.50-50magazine.fr\/2014\/10\/30\/gago-de-la-feminite-a-lultramasculinite-dans-une-societe-hypernormee\/","title":{"rendered":"Gago : de l'a-f\u00e9minit\u00e9 \u00e0 l'ultramasculinit\u00e9 dans une soci\u00e9t\u00e9 hypernorm\u00e9e"},"content":{"rendered":"
L’Arm\u00e9nie est un pays marqu\u00e9 par un rappel normatif \u00e0 l\u2019ordre de genre pr\u00e9sent dans tous les champs de la vie sociale\u00a0: l\u2019espace public (la rue, le quartier d\u2019habitation, les transports publics), l\u2019espace professionnel et familial. Alors que la plupart des pays europ\u00e9ens tentent d\u2019avancer en mati\u00e8re de l\u00e9gislation des personnes transgenres et transsexuelles, en Arm\u00e9nie, elles restent encore condamn\u00e9es juridiquement et socialement. Le changement d’\u00e9tat-civil leur est refus\u00e9 et elles ne b\u00e9n\u00e9ficient d’aucune protection sociale ou m\u00e9dicale. Cette r\u00e9pression sociale traverse la vie de chaque personne hors du sillage conventionnel de ce que doit \u00eatre un homme et une femme. 50-50 a rencontr\u00e9 Gago, personne transgenre F(emelle) to M(ale) arm\u00e9nien, partageant son quotidien pendant plusieurs semaines, l’accompagnant dans tous les actes de Sa vie qui le confrontent \u00e0 cette d\u00e9\/conformit\u00e9 de genre. L’Arm\u00e9nie est un pays marqu\u00e9 par un rappel normatif \u00e0 l\u2019ordre de genre pr\u00e9sent dans tous les champs de la vie sociale\u00a0: l\u2019espace […]<\/p>\n","protected":false},"author":5,"featured_media":0,"comment_status":"closed","ping_status":"open","sticky":false,"template":"","format":"standard","meta":[],"categories":[117,49],"tags":[44],"yoast_head":"\n
\nGago, femme devenu homme, un cas \u00e0 part en Arm\u00e9nie<\/strong>
\nGago a 28 ans et vit \u00e0 la p\u00e9riph\u00e9rie d\u2019Erevan, capitale de l\u2019Arm\u00e9nie.
\nLe destin l’a fait na\u00eetre femme, mais depuis son plus jeune \u00e2ge, il s’est toujours pens\u00e9 et senti homme. Il y a cinq ans, il a entam\u00e9 sa transition de F(emale) to M(ale) pour, dit-il, \u00abretrouver son corps.\u00bb Les hormones n\u00e9cessaires ne sont pas autoris\u00e9es \u00e0 la vente en Arm\u00e9nie et il doit se les procurer ill\u00e9galement. Pour Gago, l’aboutissement de sa d\u00e9marche, sa \u00ab fin logique \u00bb ne peut \u00eatre que le changement de sexe par la chirurgie, op\u00e9ration interdite dans son pays et qui ne peut donc se pratiquer qu’\u00e0 l’\u00e9tranger ou en secret, avec tous les dangers li\u00e9s \u00e0 une pratique clandestine.
\nDepuis quatre ans, Gago a une compagne, avec laquelle il r\u00eave de pouvoir se marier et fonder une famille. Mais il ignore comment il pourra encore vivre dans son pays apr\u00e8s son changement de sexe.
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\nDes r\u00f4les masculins et f\u00e9minins fig\u00e9s<\/strong>
\nSelon des \u00e9tudes r\u00e9alis\u00e9es par des associations LGBT arm\u00e9niennes, l\u2019homophobie est presque aussi g\u00e9n\u00e9rale dans les grandes villes que dans les campagnes. Dans son immense majorit\u00e9, la population consid\u00e8re encore les trans, et d’une mani\u00e8re g\u00e9n\u00e9rale les minorit\u00e9s sexuelles (gay et lesbiennes) comme des malades ou des monstres. Les r\u00f4les masculins et f\u00e9minins restent strictement codifi\u00e9s dans la soci\u00e9t\u00e9 arm\u00e9nienne contemporaine\u00a0: une femme doit ob\u00e9ir aux hommes de sa famille (p\u00e8re, fr\u00e8re, mari), elle n\u2019est valoris\u00e9e qu\u2019en tant que m\u00e8re. Quant aux hommes, ils doivent en toutes circonstances prouver leur \u00abvirilit\u00e9\u00bb.
\nDepuis son plus jeune \u00e2ge, Gago s\u2019est m\u00eal\u00e9 au monde masculin, en ne jouant qu\u2019avec des petits gar\u00e7ons, et plus tard en adoptant les codes des \u00abmauvais gar\u00e7ons\u00bb de son quartier, au point d\u2019\u00eatre consid\u00e9r\u00e9 par les bandes comme un membre \u00e0 part enti\u00e8re. Par sa \u00abtchatche\u00bb, qui compensait largement son d\u00e9faut de force physique, il a fait rapidement oublier qu\u2019il \u00e9tait en r\u00e9alit\u00e9 une fille et a gravi les \u00e9chelons \u00e0 l\u2019int\u00e9rieur de sa bande.
\nCette reconnaissance par les dominants de son quartier a eu des effets au sein m\u00eame de sa famille de Gago: elle est pass\u00e9e de la honte d\u2019avoir une fille qui refusait sa \u00abnature\u00bb au respect pour le jeune homme estim\u00e9 de tout le quartier.
\nGago a commenc\u00e9 des \u00e9tudes de th\u00e9\u00e2tre \u00e0 l\u2019Institut national de th\u00e9\u00e2tre et de cin\u00e9ma d\u2019Erevan (l\u2019\u00e9quivalent du Conservatoire national d\u2019art dramatique en France). Comme partout ailleurs, les milieux artistiques sont plus ouverts sur ces questions et Gago y a \u00e9t\u00e9 accept\u00e9 sans aucun probl\u00e8me.
\n\u00c0 l\u2019\u00e9poque de notre rencontre, Gago travaillait depuis plusieurs mois comme serveur dans un caf\u00e9-restaurant. Trouver un travail pour quelqu\u2019un dont les papiers ne correspondent pas \u00e0 son identit\u00e9 de genre est une mission quasi-impossible dans un pays comme l\u2019Arm\u00e9nie. Mais, par chance, la patronne de ce restaurant a v\u00e9cu de longues ann\u00e9es \u00e0 Los Angeles et n\u2019a pas de pr\u00e9jug\u00e9s contre les personnes LGBT. Bien \u00e9videmment, les client-e-s ne savent rien de l\u2019histoire singuli\u00e8re du jeune homme.
\nOn peut penser que Gago a eu de la chance de trouver \u00e0 chaque \u00e9tape de sa vie des personnes qui l\u2019ont prot\u00e9g\u00e9 et respect\u00e9. Sa forte personnalit\u00e9 y est pour beaucoup. Et aussi l\u2019\u00e9vidence, pour qui le rencontre, qu\u2019il est heureux et a trouv\u00e9 son \u00e9quilibre.
\nCependant sa situation reste pr\u00e9caire\u00a0: en dehors de son quartier, il risque les insultes, les coups voire la mort. Il est bien conscient de la force des traditions dans un pays o\u00f9 toute personne qui sort des r\u00f4les conventionnels est confront\u00e9e \u00e0 cette r\u00e9pression sociale.
\nParce qu\u2019il garde au c\u0153ur l’espoir d’\u00eatre un jour accept\u00e9 et compris de tout le monde, il a accept\u00e9 de t\u00e9moigner \u00e0 visage d\u00e9couvert.
\nAnna Ghangiryan 50-50<\/strong><\/p>\n","protected":false},"excerpt":{"rendered":"