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Les filles aux mains jaunes est une pièce de théâtre enthousiasmante sur les femmes qui travaillèrent dans les usines d’armement de la Première guerre mondiale et, remplaçant les hommes partis au front, découvrirent la voie de leur émancipation. Servie par quatre comédiennes et une mise en scène magnifiques, la pièce se joue jusqu’au 31 décembre 2022 au Théâtre Rive gauche à Paris.
Les filles aux mains jaunes est une pièce de théâtre comme on aimerait en voir plus souvent. Tout en puissance et finesse, grave et drôle, engagée, intelligente, féministe.
1915. C’est la Première guerre mondiale. Les hommes, pères, frères et fils, sont au front. Les femmes travaillent dans les usines d’armement. Il faut bien survivre et nourrir les enfants. Il faut bien nourrir la victoire au bout de la guerre avec les obus qu’elles fabriquent à la chaîne et qui déposent cette substance toxique jaune sur leurs mains, et dans leurs poumons, chaque jour.
Julie, Rose, Louise et Jeanne sont quatre ouvrières venues de divers horizons dans cette usine d’armements, qui recrute des femmes, pour la première fois confrontées au monde du travail et ses injustices réservées au « deuxième sexe ». L’une est mère de famille, son mari et ses deux fils sont partis à la guerre. L’autre, la jeune Julie, rêve du jour, proche croit-elle, où elle s’unira à son héros revenu victorieux. La troisième est une suffragiste, de ces femmes engagées qui se battent pour le droit de vote et d’éligibilité de cette moitié de l’humanité toujours reléguée parce que féminine. Elle revendique la citoyenneté pleine et entière de tous et toutes. La dernière, épouse et mère au foyer, trouve bien normal d’apporter son tribut à l’effort de guerre… mais si effacée jusque-là, elle deviendra chemin faisant au côté de ses compagnes, porte-parole de revendication salariale et de lutte pour l’égalité entre les femmes et les hommes.
La pièce Les filles aux mains jaunes est un bijou, incisif comme le diamant, subtil comme la nacre. Sur fond de guerre, de bruit et de fureur dans les tranchées autant que dans les ateliers de l’usine, les « obusettes » comme on les appelait expérimentent la solidarité entre elles, la découverte d’une liberté du corps et de la pensée, la prise de parole singulière au nom de toutes, une prise de conscience de l’ordre de l’engagement citoyen contre l’injustice sociale.
On sort revigoré.es de cette pièce, portée par le texte puissant de Michel Bellier, magnifié par la très talentueuse metteuse en scène, Johanna Boyé, et quatre comédiennes qui jouent admirablement juste et bien.
Il vous reste quelques jours avant la dernière le 31 décembre, c’est vraiment un cadeau à s’offrir pour les fêtes de fin d’année. De ces spectacles dont il reste trace en nous longtemps après.
Jocelyne Adriant-Mebtoul 50-50 Magazine
Théâtre Rive gauche, 6 rue de la Gaité 75014 Paris