Articles récents \ Monde \ Pays Arabes Rafah Anabtawi : « Kayan est la seule association palestinienne féministe basée en Israël »
Rafah Anabtawi, directrice de l’association féministe Kayan, qui vient en aide aux femmes de la minorité palestinienne en Isräel, témoigne sur les actions et les objectifs de l’association. Kayan se bat pour l’égalité femmes/hommes ainsi que contre les injustices faites aux femmes palestiniennes.
Quel est votre parcours ?
J’ai un Master en travail social et en management. Avant Kayan, j’intervenais en freelance et comme volontaire pour des associations. J’ai rejoins Kayan en 2007 et je suis devenue directrice de l’association en 2013.
Quelles sont les objectifs de Kayan ?
Kayan est une association palestinienne féministe basée en Israël. Elle a été créée en 1998 par des féministes activistes qui voulaient se battre pour l’égalité des genres, et pour une société dans laquelle les femmes puissent prendre des décisions par elles-mêmes. Elles souhaitaient également offrir aux femmes les mêmes chances de travail que les hommes.
Aujourd’hui, nous continuons de travailler pour l’égalité et nous nous battons contre l’injustice faite aux femmes, à l’échelle locale mais aussi nationale. Notre objectif est de donner à ces femmes les compétences nécessaires pour créer du changement dans leur communauté et dans leur vie. Nous avons aussi un réseau unique, que nous appelons jusur, et qui signifie « ponts » en français. Ce réseau nous permet d’atteindre toutes les femmes qui ont besoin de nous à l’échelle nationale.
Kayan est la seule association palestinienne féministe basée en Israël. Nous avons un service juridique qui met l’accent sur les problèmes personnels tels que le mariage, le divorce, la garde partagée ou la pension alimentaire. Nous travaillons également avec des femmes victimes de violences et de harcèlement sexuel sur leur lieu de travail. Nous cherchons aussi à impliquer les femmes dans la prise de décision, dans la politique, notamment dans les conseils locaux. L’association les aide également dans les démarches de logement et de propriété de terres par exemple. Nous travaillons beaucoup avec des hommes et des jeunes pour les sensibiliser sur les droits des femmes.
De plus, Kayan est la seule organisation à avoir un statut de consultant auprès de l’ONU concernant la condition des femmes palestiniennes. Chaque année, nous envoyons des rapports et nous faisons des discours sur ce sujet.
Comment les femmes entrent-elles en contact avec vous ?
Nous avons une ligne téléphonique ouverte 24h/24h. Beaucoup de femmes contactent Kayan via ce numéro pour demander un support légal ou même émotionnel. Notre ligne est ouverte à toutes, et si des femmes nous appellent concernant un sujet sur lequel nous ne sommes pas compétent·es, nous sommes à leur écoute et nous leur conseillons un organisme susceptible de les aider. Certains groupes et associations nous contactent aussi parfois pour nous demander un partenariat. Ces groupes peuvent ainsi nous recommander aux femmes qui viennent les trouver.
Nous cherchons sans cesse à entrer en contact avec des villages ou des quartiers où les femmes ne viennent pas à notre rencontre. Ce silence veut dire beaucoup de choses : elles n’ont peut-être jamais entendu parler de nous, ou bien elles ne savent pas quelles sont les actions de Kayan pour les aider. C’est pourquoi nous réalisons fréquemment des campagnes d’information. Nous informons également par téléphone et pas SMS, car beaucoup de personnes n’ont pas accès à internet et aux réseaux sociaux. Nous faisons aussi appel aux journaux et aux médias pour diffuser nos coordonnées.
Dans les villages où nous travaillons, nous savons que notre association a pris racine. Si les femmes ne nous contactent pas directement, elles peuvent passer par des groupes et des associations locales. Nous intervenons également beaucoup dans les écoles, dans lesquelles nous organisons des ateliers avec les jeunes pour les sensibiliser sur les droits des femmes.
Quels sont vos projets en cours ou futurs ?
Nous avons un projet qui se nomme « Your turn » (À ton tour), qui vise à augmenter la participation des femmes dans la politique locale. À l’approche des élections locales d’octobre 2023, il est très important d’intégrer les femmes dans la politique et d’augmenter leur participation.
Nous avons aussi des projets annuels de campagnes contre les violences subies par les femmes. Enfin, nous avons un super projet de combat contre le harcèlement sexuel au travail, nous intervenons auprès des employeur·es et des employé·es afin de les sensibiliser et de leur apporter du soutien et des informations juridiques.
Propos recueillis et traduits par Morgane Irsuti 50/50 Magazine