Articles récents \ Monde \ Europe Utile aux femmes, aux communautés et aux personnes dans le besoin: « ensemble pour une société inclusive, exempte de violences et de discriminations »
L’Association Useful to Women, Communities and people in need (Utile aux femmes, aux communautés et aux personnes dans le besoin) est une association albanaise qui fournit des services facilitant le développement et l’intégration des femmes et des communautés dans le besoin. Elle vise à jouer un rôle de premier plan dans l’égalité femmes/hommes et les droits humains. Elle est soutenue, entre autres, par le Fonds pour les Femmes en Méditerranée. Dritmira Gremi est la coordinatrice de cette association.
Pourquoi avoir créé cette association ?
Les changements politiques en Albanie dans les années 90 ont montré l’impuissance de l’État à protéger sa population en fournissant des services sociaux. Pourtant, certains phénomènes non traités comme le trafic d’êtres humains, les violences domestiques, la migration, l’urbanisation, le chômage, la drogue ou encore l’abandon de l’école par les jeunes, nécessitaient une intervention immédiate. Cependant, un petit pays comme l’Albanie n’était et n’est toujours pas institutionnellement préparé pour répondre aux besoins des citoyen·nes à cause d’un manque cruel de soutien logistique et financier. C’est à des associations de la société civile qu’est revenu le rôle de combler ces lacunes en se substituant à l’État pour offrir des services sociaux à même de contrer ces nouvelles problématiques.
Nous avons commencé à fonctionner en 2000 avec le centre Un rêve de plus, qui aidait les personnes marginalisées (enfants, jeunes et femmes). La position de notre centre dans l’un des quartiers les plus pauvres de la ville où vivaient les communautés rom et égyptienne et les communautés provenant des zones rurales, nous a permis de mieux comprendre leurs problèmes et leurs besoins. Nous avons dès lors pu fournir des services sociaux décents dans une zone où ces services étaient manquants ou insuffisants. Notre premier donateur a été l’ICCO (1). Avec leur soutien, nous avons d’abord mis en place un soutien psychologique et des conseils aux femmes. Puis nous avons commencé des formations professionnalisantes (couture, coiffeur, informatique, langues étrangères, cuisine, etc). Le rôle de notre centre a été crucial et indispensable dans les campagnes et les activités de sensibilisation ainsi que dans le soutien aux victimes de violences.
En 2017 nous avons créé Utile aux femmes, aux communautés eu aux personnes dans le besoin. 2017-2020 peut être considérée comme la période “d’essai” de l’association. Durant celle-ci nous avons consolidé notre expertise et les services pour les femmes et les communautés dans le besoin ont été améliorés et élargis. Les campagnes de sensibilisation ont été intensifiées, le nombre d’employé·es a augmenté et l’association s’est structurée. Le partenariat avec ICCO a été continuellement renforcé par des accords avec tous les acteurs publics de l’État en faveur des femmes et des communautés marginalisées.
Pouvez-vous nous présenter vos actions ?
Nous concentrons notre travail dans différentes directions : la prestation de services de soutien spécialisés pour les femmes et les filles victimes de violences, des programmes d’éducation et d’autonomisation économique, la diffusion de l’information et des campagnes de sensibilisation sur le lobbying, la défense des droits etc. L’association préconise des politiques d’égalité et de progrès sociaux. Sa vision est : Ensemble pour une société inclusive, exempte de violences et de discriminations. .
Notre siège est à Elbasan (une des principales villes d’Albanie) et dispose d’un personnel de professionnel·les et d’un centre de conseils. Ce centre offre soutien psychologique, social, individuel et collectif ; médiation avec les membres de la famille pour trouver des solutions à la résolution de problèmes ; renvoi des cas à d’autres services si nécessaire ; information, orientation pour l’autonomisation économique et l’orientation professionnelle.
Comment sensibilisez-vous le grand public ?
Nous organisons des événements sur les places de la ville, des forums communautaires avec des femmes, des hommes et des représentant·es des gouvernements locaux, des réunions de sensibilisation dans les écoles sur les stéréotypes sexistes et sur le rôle des femmes et des filles dans la vie publique. Pour cela l’association produit du matériel : vidéos, publications, dépliants, affiches, articles sur les réseaux sociaux, etc. Nous faisons aussi des sessions supplémentaires pour les femmes bénéficiaires des services proposés pour approfondir leurs connaissances de leurs droits et des aides auxquelles elle peuvent prétendre.
Quelles formations réalisez-vous ?
Nous organisons des formations pour les femmes et les filles sur l’autonomisation économique et un programme longue durée de conseils en matière d’emploi et d’entrepreneuriat. Nous proposons également des formations pour les enseignant·es, les responsables d’école et le personnel administratifs sur l’égalité des sexes, pour renforcer la place des femmes dans la vie publique et les instances décisionnelles.
Pour la réalisation de ses objectifs, Utile aux femmes, aux communautés et aux personnes dans le besoin coopère étroitement avec les institutions publiques, les municipalités, les conseils de district, les services sociaux de l’État, le Bureau pour la protection des droits de l’enfant, le Bureau local de l’éducation d’Elbasan et diverses ONG, etc. Depuis 2017, elle est également membre de la Résolution 1325 de la Coalition nationale et du comité contre la traite des êtres humains de la préfecture d’Elbasan.
Quels effets avez-vous pu constater ?
Au cours des années 2017-2020 suite à la mise en œuvre des projets des donateurs: Swiss Contact, Women Forum, ONU Femmes, Fonds pour les Femmes en Méditerranée, Gender Alliance for Développement Center et AWEN (l’Internationale de l’Education), l’organisation a eu une vaste activité. Elle a mené différents projets, allant des séances de conseil juridiques, administratifs et professionnels, aux plaidoyers pour les droits des femmes, et aux formations pour apprendre à prendre la parole en public et au sein des instances décisionnelles par exemple. Ces projets ont contribué à accroître la sensibilisation à l’importance de la participation aux élections, en mettant particulièrement l’accent sur l’éducation des électrices. Nous avons contribué à mettre en évidence les capacités des femmes en tant que candidates et leaderes politiques, à briser les stéréotypes négatifs des femmes et à promouvoir leur pleine participation au processus électoral. Nous avons ainsi encouragé les jeunes à propager ces idéaux d’égalité dans leurs communautés et familles respectives et les résultats ont été impressionnants.
Voici quelques-uns des indicateurs obtenus au cours de cette période : 1300 jeunes ont été informé·es et sensibilisé·es aux violences domestiques, 1005 femmes et hommes ont participé à nos réunions de sensibilisation, 3 campagnes contre les violences sexistes et 1 campagne sur l’emploi des femmes ont été organisées et 20 vidéos de sensibilisation ont été postées sur nos réseaux sociaux.
Quels sont vos plans pour le futur ?
Pour assurer la continuité de l’association nous avons quelques objectifs stratégiques.
Premièrement, sensibiliser les familles, les partis politiques et les actrices et acteurs locaux aux violences liées au genre et promouvoir une représentation égale des sexes lors de la participation à la vie publique.
Deuxièmement protéger les droits des femmes par le renforcement des institutions étatiques et non-étatiques pour la mise en œuvre des politiques nationales existantes en matière d’égalité des sexes et réhabiliter et réintégrer les survivantes de violences.
Troisièmement, assurer le financement et la durabilité : un problème quotidien est de trouver des soutiens financiers pour permettre la mise en œuvre des activités. Comme nous sommes une association, le financement est habituellement à court terme et vise des projets précis, ce qui rend difficile la réalisation d’activités sur le long-terme. Ce manque de fonds restreint l’impact que nous avons auprès des populations concernées. Nous nous concentrons sur les campagnes de sensibilisation pour convaincre le grand public et, si possible, obtenir des fonds constants de l’État, ou d’autres organismes vu sa faillite à assurer ses missions principales.
Propos recueillis et traduits par Célia Rabot 50-50 Magazine
1 ICCO est une organisation néerlandaise de coopération au développement qui œuvre pour réduire la pauvreté et pour une meilleure justice dans le monde entier afin que toutes et tous puissent vivre dans la dignité et la prospérité.