Articles récents \ Île de France \ Économie Nathalie : «les femmes ne sont vraiment pas nombreuses chez les éboueur·es»
Nathalie a été plusieurs années caissière, un métier traditionnellement imparti aux femmes. Aujourd’hui elle est cheffe éboueure dans le quartier d’Aligre à Paris. Elle supervise vingt hommes. Dans « ce métier dit d’hommes » elle arrive à s’imposer et apprécie beaucoup ce métier.
Que faisiez vous avant d’être employée par la mairie de Paris comme cheffe éboueure ?
Je travaillais à carrefour, j’étais à la caisse. C’est un milieu assez féminin. C’était bien mais entre femmes, il y a beaucoup d’histoires et en fait ce n’était pas super. Du coup j’ai changé de métier parce qu’en plus le salaire que je recevais ne me permettait pas de vivre en couple avec des enfants. Il permet de vivre uniquement si on est toute seule.
À l’époque je n’avais pas d’enfant mais maintenant j’ai un enfant qui a un an et demi.
Et j’ai donc commencé à travailler comme éboueure pour la ville de Paris en 2012. J’avoue que je trouve bizarre le terme éboueuse, cela sonne faux à mes oreilles. Je préfère éboueur avec un ‘e’.
C’est vrai que j’appréhendais un petit peu d’arriver dans un milieu où il n’y a pratiquement que des hommes. Là où j’ai commencé, sur les 50 personnes qui travaillaient, il n’y avait que 8 femmes ! Mais finalement cela s’est bien passé. Les hommes nous ont bien accueillies. Ils sont plutôt bienveillants, pour la plupart.
L’entrée est sur concours ! Il faut réussir un test écrit et ensuite passer un test physique. On doit porter des sacs lourds etc. Je dirais que sur les 150 personnes qui se présentent au concours, il doit y avoir un tiers de femmes, voire même beaucoup moins. Les femmes ne sont vraiment pas nombreuses chez les éboueur.es.
Et donc j’ai fait ce métier pendant quatre ans puis j’ai changé de poste, via une sorte de mutation. J’ai été magasinière cariste ! Je préparais les tenues des éboueur·es etc. J’ai travaillé à ce poste pendant trois ans et demi environ. Donc j’étais toujours éboueure mais j’accomplissais d’autres missions. Et là c’était la même chose, sur une équipe de 9 personnes, j’étais la seule femme. J’étais bien intégrée mais c’est surtout parce que je me suis imposée. Si vous ne vous imposez pas, alors là c’est la porte ouverte à n’importe quoi.. certains vont faire des blagues un peu bizarres, un peu sexistes par exemple.
Moi j’ai montré tout de suite que je voulais bien rigoler mais qu’il y avait des limites à ne pas dépasser. Ça c’est bien passé !
Et avant d’être caissière que faisiez vous?
J’ai fait un BEP carrière sanitaire et sociale pour travailler en crèche, une truc qui n’a rien à voir (rires). J’ai fait des stages et je n’ai pas accroché. Donc j’ai fait un truc totalement à l’opposé, j’ai été formée pour m’occuper d’enfants mais je m’occupe d’adultes (rires). C’est un peu le jour et la nuit mais je regrette pas du tout ! Je suis bien là où je suis. J’ai pu évoluer, ce qui est une chose que je n’aurais pas pu faire à Carrefour.
Comment êtres vous arrivée à devenir cheffe éboueure?
Et bien pendant presque un an, j’ai été absente parce que je suis tombée enceinte. J’ai pris six mois de congé maternité.
En fait, au tout début de ma grossesse, j’avais passé mon concours de cheffe que j’ai eu. Et donc cela fait un an que je suis cheffe. Et pareil, dans ce milieu-là, il n’y a que des hommes. Pour eux c’est un peu bizarre d’avoir une femme cheffe. Ils n’avaient eu que des hommes chefs auparavant. Mais finalement ça va parce qu’apparemment le fait que je sois là, cela apaise un peu les tensions entre-eux. Ils ont une façon de parler entre-eux qui a un peu changé depuis que je suis là ! On m’a dit que d’habitude, ils étaient plutôt crus dans leurs propos et comme maintenant il y a une femme, ils sont un peu plus subtiles (rires).
Mais il y a des jours où ils oublient que je suis là et je leur fais la remarque mais sinon, ils ont été super accueillants et bienveillants. Ils m’ont un peu appris le travail parce que je ne le connaissais pas bien. Mon intégration s’est super bien passée. Je pense qu’aujourd’hui, et ce n’est pas pour me lancer des fleurs, si je pars ou si je devais changer de poste, ils seraient un peu tristes. J’ai bien choisi mon atelier !
Propos recueillis par Caroline Flepp 50-50 Magazine