Articles récents \ France \ Société M Your Body : Le projet artistique pour apprendre à aimer son corps
Marine Gohier est professeure d’arts appliqués dans un lycée professionnel. Il y a 4 ans elle a créé son association, M Your Body, un projet qui a évolué avec elle. Aujourd’hui c’est également un compte Instagram sur lequel elle publie dessins et témoignages écrits.
M Your Body c’est d’abord un projet de dessin. Marine Gohier propose de dessiner les corps, généralement nus ou en sous-vêtements. “ Le but est de pouvoir se réapproprier son corps, c’est un outil thérapeutique ”. Créant des portraits intimes et personnels, elle revendique un point de vue “ subjectif ”. “ J’essaie d’être le plus neutre possible, je m’attache à tous les détails de la photo et des proportions, mais il s’agit également de mon regard d’artiste sur le corps de quelqu’un ”.
Pourtant, envoyer son corps nu à une artiste pour se faire dessiner ne va pas de soi. Pour certaines personnes l’envoi d’une photo peut prendre plusieurs mois. “ Ce qui est intéressant c’est surtout le processus ” explique Marine Gohier. Dans ce parcours vers l’acceptation de soi, elle tente d’établir une relation de confiance avec ses modèles de manière à les accompagner au mieux.
L’artiste se nourrit également de ces relations. Ces discussions l’amènent à se questionner et parfois à changer de regard. Apprenant des personnes aux profils très variés qu’elle dessine, la professeure affirme que le projet évolue en même temps qu’elle. Sur son compte Instagram m.your.body, ce sont d’abord des femmes et des hommes du monde de la fitness qu’elle dessinait, alors qu’elle-même cherchait à se conformer aux normes de beauté imposées aux femmes. En les dessinant, elle réalise que malgré leur apparente aisance, toutes et tous demeurent insatisfait·es de leur propre corps. Elle s’inquiète du risque d’orthorexie : “ L’obsession de manger sain, ce n’est pas sain en fait ”.
Depuis, le compte tend vers plus de diversité. Sur son profil Instagram elle se décrit comme une féministe “ anti diet culture ”. “ J’ai pris conscience de cette notion il n’y a pas si longtemps que ça alors que c’est ce que je combats depuis longtemps « , explique-t-elle, c’est le “ culte des corps et de la santé à tout prix. Pour moi ce sont toutes ces injonctions à devoir entrer dans la norme et cette fausse croyance selon laquelle si tu es gros·se tu es forcément en mauvaise santé ”.
Depuis peu, elle partage également des témoignages sans dessin sur son compte en évoquant des thématiques diverses telles que l’endométriose, les violences médicales ou la dépression. Tout le monde peut ainsi apporter son témoignage personnel.
Impressionnée par l’engagement féministe de plus en plus fort des adolescentes sur Instagram, elle se questionne sur l’impact du réseau social dans sa politisation personnelle : “ Je crois que sans Instagram je ne serai pas devenue la féministe que je suis aujourd’hui ”.
Au-delà de l’association et de son compte Instagram, Marine Gohier crée des liens entre ses engagements personnels et son métier de professeure d’arts appliqués. Ses cours lui permettent d’aborder divers sujets liés au corps en faisant travailler ses élèves sur la question et en mettant en avant des physiques variés. En mars 2020, peu de temps avant le premier confinement, elle débute des ateliers bien-être qu’elle anime. Maintenus de manière virtuelle depuis, elle espère les reprendre très prochainement en présentiel. Ces ateliers sont pour elle l’occasion de questionner les participant·es sur leur créativité et leur rapport au corps.
Laurène Pinvidic 50-50 Magazine