Articles récents \ Culture \ Théâtre Comment Virginie D. a sauvé ma vie : âprement féministe !
Avignon le Off. Une fillette violée par son grand cousin Georges, une grossesse non désirée suite à un viol, les images font mouche, les mots sont crus…Corinne Merle a écrit un texte violemment féministe et très étayé, qu’elle défend avec ses tripes.
Sûre qu’elle est fatigante, Corinne Merle, avec son féminisme débridé : elle le dit elle-même ! Le viol a détruit sa vie. « Violée j’ai été. Violée je resterai. » Si elle fait surface aujourd’hui, c’est, explique-elle, grâce à la lecture de King-Kong Théorie de Virginie Despentes… dont elle cite quelques extraits bien choisis. Les hommes, d’emblée, en prennent pour leur grade. Des salauds, tous ! Enfin, tous les violeurs. Quelques chiffres ponctuent le propos : 98% des viols sont commis par des hommes. 84 000 femmes sont violées chaque année. 9% seulement des femmes portent plainte. Et 3% des plaintes aboutissent à des condamnations. Imparable ! La cinquantaine bien assumée, Corinne Merle se présente en vamp, petite robe noire et talons aiguilles. Ce qui ne l’empêche pas de s’en prendre avec virulence aux hommes qui ravagent la vie des femmes. Aux pères, grand-pères, oncles, entraîneurs sportifs, patrons, maris…
En résistance !
Corinne Merle laisse parler son corps et ses tripes. Elle est sa mère et sa grand-mère, sa sœur et chacune de nous qui avons subi des violences de toutes sortes, à commencer par le harcèlement de rue, un grand classique en 2021 encore. Quand l’exaspération monte, elle se venge sur des œufs qu’elle casse avec rage et volupté ! Chacun.e interprétera l’image à sa façon. Malgré la noirceur du propos, malgré la légitime colère, l’humour n’est jamais loin. Les situations sont parfois drolatiques. François Jenny, son metteur en scène et complice, la rejoint sur scène pour incarner Albert Cohen dans une savoureuse interview par Jacques Chancel. Mieux vaut en rire !
Le spectacle est rythmé, mélange de vives paroles chantées par France Gall, Résiste !, et de propos salvateurs de Virginia Woolf : « ce que l’on attend de l’être avec qui l’on vit, c’est qu’il vous maintienne au niveau le plus élevé de vous-même. » Et finalement, Corinne Merle, « femme fragile aux chevilles d’argiles, de plus en plus lucide, de moins en moins docile », s’est relevée. Femme debout, elle continue inlassablement à emmerder tout le monde avec son féminisme. Heureusement !
Sylvie Debras 50-50 Magazine
Photo de Une Camille Wodling