Articles récents \ Monde Méditerranée : assurer l’accès aux droits sexuels et reproductifs
Les associations italienne Obiezione Respinta et libanaise Marsa Sexual Health Center accompagnent les femmes de leurs pays dans l’accès aux droits sexuels et reproductifs. Accès à l’IVG, pilule du lendemain, ou tout simplement transmission d’informations sur la santé sexuelle, ces associations font un travail de terrain nécessaire qui a dû s’adapter à la crise sanitaire. Soutenues par le Fonds pour les Femmes en Méditerranée, elles se sont rencontrées il y a quelques jours pour discuter de ces thématiques.
Le 10 juin dernier, une première rencontre virtuelle avait lieu entre les femmes de la Méditerranée. A l’approche du Forum Génération Égalité, ces questions sont centrales dans les débats sur l’égalité femmes/hommes. Organisée par le Fonds pour les Femmes en Méditerranée (FFMed), qui soutient depuis 2008 des associations du pourtour méditerranéen, la rencontre a permis de faire discuter des associations aux besoins divers, tournés vers l’accès par les femmes méditerranéennes à leurs droits sexuels et reproductifs. Le FFMed contribue notamment à porter la voix des femmes de la région auprès des structures et institutions, locales ou internationales.
Agir pour la santé sexuelle et reproductive
Les intervenantes ont discuté du rôle de leurs associations et de la manière dont la pandémie les a mené à reconsidérer leurs pratiques. Fatima Khalil est bénévole au sein du Marsa Sexual Health Center, basé à Beyrouth. Depuis 2011, le centre s’est donné pour mission de plaider pour les droits sexuels et reproductifs au Liban, de créer et de diffuser de l’information concernant la santé sexuelle, tout en promouvant des messages positifs autour de la sexualité. Agissant dans un pays où le recours à l’interruption volontaire de grossesse est illégale, les membres de l’association tendent à s’adapter au public auquel elles s’adressent.
Bianca Monteleone travaille pour l’association Obiezione Respinta basée à Pise en Italie. L’association est née en 2019 de discussions personnelles autour de l’accès à la contraception et notamment à la pilule du lendemain. Elle collecte des données sur tout le territoire italien dans le but de créer un réseau de soignant·es qui assure un accès libre aux droits sexuels et reproductifs. Ces données leur ont permis de mettre au point une carte, régulièrement mise à jour, disponible sur leur site internet. Si l’IVG est légale en Italie jusque 12 semaines de grossesse, les mentalités des soignant·es freinent encore parfois l’accès à la contraception d’urgence et à l’avortement. En Italie, les médecins peuvent légalement invoquer leur clause de conscience et ainsi refuser de pratiquer une IVG (1).
Cette dernière année, tout au long de la pandémie de Covid-19, l’avortement était considéré comme une intervention non-essentielle en Italie, rendant son accès particulièrement difficile. Les gynécologues, réquisitionné·es pour aider à gérer la crise sanitaire, n’assuraient plus leurs consultations, tandis que les limitations de déplacement empêchaient certaines femmes de se rendre dans des centres plus éloignés pour avorter.
A Beyrouth, le Centre Marsa a lui aussi dû fermer ses portes au plus fort de la pandémie. Les bénévoles ont alors travaillé en ligne, en essayant de relayer des informations sur la santé sexuelle.
La mise en réseau
Le soutien du FFMed a permis à Obiezione Respinta de créer un environnement sûr pour que les personnes ayant eu recours à une IVG puissent s’exprimer librement et recevoir une aide psychologique lorsque cela est nécessaire. Le financement leur a par ailleurs permis de voyager en Italie, avant le début de la pandémie, et d’accéder ainsi à des zones rurales, où l’accès à l’information n’est pas toujours évident, notamment dans les établissements scolaires. Cette aide a également permis de développer des actions de sensibilisation sur les réseaux sociaux. Il peut en effet être difficile de trouver des informations qui ne sont pas produites par le corps médical en Italie.
Les deux associations travaillent de plus en plus avec d’autres organisations. Le Centre Marsa a ainsi pu développer des liens avec des ONG telles que OXFAM par exemple. La mise en réseau permet d’accroître la voix des associations et de trouver des soutiens financiers pour leurs communautés. L’association de Bianca Monteleone travaille principalement avec des organisations locales mais tend à développer des webinaires avec des organisations en Pologne ou en Argentine, où la question des droits reproductifs est au cœur de l’actualité.
Le Centre Marsa a par ailleurs pu collaborer avec des organisations œuvrant auprès de personnes réfugiées au Liban. Les membres de l’association ont pu se rendre dans des camps où elles ont proposé des tests pour les Infections sexuellement transmissibles (IST) et des consultations médicales gratuites. Ces actions se sont accompagnées de campagnes d’information sur toutes les questions concernant la santé sexuelle et reproductive.
Laurène Pinvidic 50-50 Magazine
(1) Pour aller plus loin, lire notre article « L’accès à l’avortement se dégrade en Italie »