Articles récents \ Culture Summer playlist : les pépites à (re)découvrir cet été !
Allongé·es sur une plage ou confortablement installé·es dans notre lit, on a tou·tes envie de (re)découvrir les œuvres féministes d’hier et d’aujourd’hui. Voici une proposition de sélection de livres, films, séries et musiques qui permettent à la fois de s’évader et de nourrir sa culture féministe !
Madeline Miller, Circé, Editions Rue Fromentin (2019)
La mythologie grecque regorge de personnages féminins forts et indépendants. Des déesses comme Artémis ou Athéna sont même réputées féroces et impitoyables dès lors qu’un homme ose leur manquer de respect. Ainsi, le chasseur Actéon est métamorphosé en cerf et dévoré vivant par ses chiens après avoir surpris la déesse de la chasse nue pendant son bain en forêt. L’autrice étasunienne Madeline Miller s’empare du mythe de la sorcière Circé, figure emblématique du voyage d’Ulysse. Cependant, nulle mention du fameux héros vanté par les livres d’aventures : Ulysse apparaît bien obscur à côté d’une femme hors du commun. Madeline Miller redonne ses lettres de noblesse à un personnage souvent diabolisé : Circé, demi-déesse et fille du Soleil, exilée sur une île, s’initie à la sorcellerie et vit comme elle l’entend. L’écriture est fluide et plaisante, et le mythe de Circé se dévoile au fil des pages comme une légende féministe oubliée. Ce livre est parfait pour tou·tes celles/ceux féru·es de mythologie et de personnages en proie à leurs contradictions.
Alice Walker, La couleur pourpre, Editions Robert Laffont – Pavillons Poche (2016)
L’autrice et militante Alice Walker est un monument de la littérature américaine. Elle reçoit le Prix Pulitzer en 1983 pour La Couleur Pourpre, un chef d’oeuvre afroféministe à lire au moins une fois dans sa vie. Plus que son histoire, c’est le récit d’une Amérique violente et ségrégationniste que l’écrivaine raconte. Entre rires et larmes, on ne peut lâcher ce livre qui dénonce le racisme et les violences quotidiennes subies par des petites filles forcées de devenir femmes du jour au lendemain, tandis que leur force et leur fureur de vivre nous impressionnent, jusqu’à leur libération finale. Le style d’Alice Walker est cru, unique, imprégné de ses convictions féministes et antiracistes. La Couleur Pourpre est sans aucun doute un livre qui laisse grandi·e et déterminé·e. Il a été adapté en film par Steven Spielberg en 1985.
Joyce Carol Oates, Confessions d’un gang de filles, Editions Le Livre de Poche (2014)
Confessions d’un gang de filles est un livre à part dans l’ensemble de l’oeuvre de l’autrice de renommée internationale qu’est Joyce Carol Oates. En effet, les jeunes filles du gang de rue autoproclamé “Foxfire” sont engagées dans une expédition punitive ; quiconque se mettra sur leur route le paiera cher, très cher. Maddie, la narratrice, est obsédée par la légèreté et l’inconscience de la leadeuse du groupe, Legs. Les adolescentes sont prêtes à tout pour revendiquer leur existence face à un monde violent dominé par des hommes grotesques et corrompus. Joyce Carol Oates aborde ici des thèmes universels, comme le bouleversement de l’adolescence ou l’envie de s’émanciper à tout prix, mais aussi des sujets plus sensibles, comme les violences machistes. Le livre est unique par sa manière de dépeindre des personnages au bord de l’abîme, en permanence sur le point d’imploser.
Park Chan-Wook, Mademoiselle (2016)
Ames sensibles s’abstenir : Mademoiselle est un film à la fois fascinant et dérangeant, au sens premier du terme. Les deux protagonistes perturbent un ordre jusque-là bien établi. Tandis que la noble Hideko provoque un déchaînement de passion sexuelle destructeur dans son propre foyer, l’ambitieuse et arnaqueuse Sookee s’infiltre insidieusement dans le riche manoir servant de décor à des personnages tous plus corrompus les uns que les autres. Reste le duo de deux jeunes femmes que tout oppose, mais qui finissent par s’apprivoiser et s’émanciper de leurs geôles respectives. Le cinéaste Park Chan-Wook n’a pas son pareil pour filmer les travers d’une société très particulière, et ce qui impressionne, c’est son talent pour nous tenir en haleine jusqu’à la dernière minute. Nous tremblons pour ses héroïnes, même si nous sommes nous aussi dupé·es par leur jeu de dissimulation diabolique.
Heidi Thomas, Call The Midwife, BBC (2012)
Cette série anglaise met en scène le travail des sages-femmes de Londres au début des années 50. La jeune Jenny Lee découvre ainsi la réalité de femmes enceintes vivant dans la misère, alors que des techniques de soins révolutionnaires commencent à faire leur apparition. On suit les histoires croisées de plusieurs femmes dévouées à un métier qui laisse peu de place à une véritable vie privée, voire qui provoque la désapprobation de certain·es. Les thèmes mis en avant sont variés, allant de la peur du déshonneur familial à l’efficacité des premiers contraceptifs. Le décor est somptueux, les intrigues remplies de détails historiques très informatifs ; on s’émerveille de l’inventivité de ces soigneuses, véritables héroïnes du quotidien. Call The Midwife est une série qui divertit autant qu’elle éduque sur le combat féministe et ses origines en Angleterre.
Eddy de Pretto, Cure (2017), notamment Kid et Grave
Les textes d’Eddy de Pretto interpellent, d’autant plus que le rap français a généralement mauvaise réputation. L’album dans son ensemble est une merveille de prose tantôt sombre, tantôt éclatante, à l’image des thèmes qu’elle aborde. Le chanteur exprime sa frustration face aux codes virilistes qui lui sont imposés dès l’enfance dans Kid, remettant en cause les injonctions permanentes à “être un homme”, à éprouver sa force au contact des autres mâles. Dans Grave, Eddy de Pretto décrit tout en délicatesse la difficile acceptation de soi dans une société hétéronormée et intolérante. Ce qui transparaît le plus dans l’univers de l’artiste, c’est sa capacité à chanter la joie comme la peine avec la sincérité la plus totale. Cure est une oeuvre musicale à écouter, pour ses textes et les messages qu’elle fait passer.
Perrine Arbitre 50-50 magazine