Articles récents \ Monde \ Europe Gwendoline Lefebvre : «On ne doit pas invisibiliser la question du genre dans la gestion de cette crise»
Le Lobby Européen des Femmes (LEF) alerte Bruxelles sur les conséquences dramatiques du confinement pour les droits des femmes et des filles. Le LEF a envoyé deux lettres à la Commission Européenne et au Conseil Européen pour leur demander de mettre en place des mesures communes et immédiates.
« Les femmes et les filles sont de plus en plus exposées à la violence et à la pauvreté, et la crise sanitaire actuelle menace leur indépendance économique, écrit Gwendoline Lefebvre, la présidente du LEF. (…) Nous devons reconnaître que beaucoup de femmes se retrouvent dans une situation précaire aujourd’hui à cause de leur sur-représentation dans le secteur des soins. Un secteur particulièrement touché par les mesures d’austérité prises ces dernières années. »
Les femmes jouent un rôle primordial aujourd’hui, en sauvant des vies – elles sont majoritaires dans le secteur des soins – et en maintenant la cohésion sociale. La crise sanitaire augmente les risques de chômage, de précarité, de pauvreté, et ce plus particulièrement pour les femmes. Le LEF demande donc à l’Union Européenne de prendre des mesures concrètes pour une « Europe plus inclusive, égalitaire et durable pour toutes et tous ». « Il est désormais urgent de reconnaître le secteur du soin comme l’épine dorsale de la société, de renforcer la solidarité, et de renforcer le modèle social européen. », peut-on lire dans un des courriers.
Nous avons posé quelques questions à Gwendoline Lefebvre pour en savoir plus sur leurs revendications.
Pourquoi avoir envoyé des lettres à la Commission et au Conseil Européen ?
Début mars, la Commission Européenne a présenté sa nouvelle stratégie pour l’égalité femmes/hommes. Dans le précédent mandat, il n’y avait aucune stratégie, donc c’est un grand pas en avant. C’est d’ailleurs la première fois qu’il y a une Commissaire européenne chargée de l’égalité. Sauf qu’ensuite, nous avons subi de plein fouet la crise sanitaire liée au Covid-19. Nos organisations membres commençaient à nous remonter que la crise avait des impacts disproportionnés sur les femmes et les filles, avec une augmentation des violences domestiques notamment. Et puis les femmes sont en première ligne dans le gestion de cette crise : elles représentent une majorité du personnel soignant, du personnel dans les commerces de première nécessité, dans les services de nettoyage, ou même dans la couture pour fabriquer des masques et des blouses. Les femmes et les filles les plus vulnérables comme les réfugiées, les migrantes, les SDF, les femmes en situation de handicap ou âgées sont encore plus à risque aujourd’hui. Il faut que l’Union Européenne réagisse et prenne conscience de ces enjeux. On ne doit pas invisibiliser la question du genre dans la gestion de cette crise et ses conséquences.
Que demandez-vous concrètement à l’Europe ? Quelles sont les mesures nécessaires ?
Nous demandons plusieurs choses. D’abord les mesures urgentes. Comment l’Union Européenne (UE) et les Etats membres vont-ils maintenir les services d’aide, d’écoute pour lutter contre les violences domestiques et sexuelles, et que peuvent-ils mettre en place aujourd’hui. À court terme les pays doivent également réfléchir à des solutions pour maintenir l’indépendance économique des femmes. Nous demandons aussi à l’UE d’assouplir ses règles budgétaires pour permettre aux Etats membres d’investir massivement dans les services publics, les services du « care », du soin. Dans les dépenses prioritaires, les Etats doivent prendre en compte les questions d’égalité. Et nous leur demandons d’allouer les fonds nécessaires à la lutte pour l’égalité entre les femmes et les hommes.
Ensuite, dans les mesures à moyen terme, nous souhaiterions que dans son prochain cadre financier pluriannuel, l’UE prennent des mesures concrètes pour plus d’égalité, et que la question budgétaire n’exclut plus la problématique du genre.
Quand attendez-vous ces réponses ?
Nous espérons avoir une réponse rapidement ! Nos membres continuent leurs actions nationales auprès des pouvoirs publics. L’économie du « care », du soin, revient sur le devant de la scène, car il est indispensable de prendre soin des êtres humains et de la planète. Et l’objectif c’est qu’on ne l’oublie pas après la fin du confinement. Il faudra revaloriser ces métiers après la crise.
Chloé Cohen, 50-50 Magazine
Lire les lettres :