Articles récents \ Sport Les Dégommeuses : place à toutes les footballeuses

En cette période de coupe du monde, le foot féminin est au cœur de toutes les discussions, mais d’autres n’ont pas attendu cet événement pour questionner ce sport ou enfiler leurs crampons. C’est le cas des Dégommeuses, une association qui a pour but la promotion du football féminin et la lutte contre le sexisme, les LGBT-phobies et toutes les discriminations. Pour discuter des problèmes de sexisme au sein de ce sport, elles ont fait appel à des spécialistes du football. Volontaires pour déconstruire, voir dégommer les clichés autour des activités sportives, les militant.es affrontent avec audace un milieu où la lutte est quotidienne.

Le coup de sifflet de départ, c’est un défi lancé par une troupe d’amies en 2010 : participer au Tournoi International de Paris (TIP), organisé par la Fédération sportive gaie et lesbienne. Un pari qui fera naître, deux ans plus tard, l’association désormais incontournable dans le milieu du foot féminin, Les Dégommeuses. L’organisation découle d’un fort désir de jouer au football, et d’offrir un environnement favorable à tout.es les passionné.es du ballon rond. Pour cela, bien que les rangs de l’association soient ouverts à tout.es, les entraînements, eux, sont réservés aux femmes et aux personnes transgenres, une manière de leur garantir un espace serein où jouer au foot. Car, si de nombreux clubs sont ouverts à tout.es, les insultes, blagues et autres discriminations y sont souvent banalisées ou ignorées.

L’association tient à rappeler la stigmatisation, subie par les femmes, d’autant plus violente pour les lesbiennes, les personnes non binaires, ou trans, dans le milieu du football. Les Dégommeuses alertent sur les clichés au sujet des femmes qui jouent au foot, souvent écartés de ce sport jugé trop « masculin ». Mais aussi et surtout, sur l’invisibilisation des minorités sexuelles par les fédérations, où les joueuses non hétérosexuelles sont reléguées au dernier rang. Pour ré-équilibrer ces inégalités, chez Les Dégommeuses, peu importe son genre, son identité, son orientation sexuelle, tout le monde a sa place sur le terrain.

 «Aller à la racine du mal» 

Dirigée par Cécile Chartrain, pour honorer ce mois rythmé en matchs intensifs, les militant.es s’interrogent sur la place des femmes dans ce sport, avec les inégalités qu’il comprend. Pour Candice Prevost, ancienne joueuse professionnelle et réalisatrice, avec Mélina Boetti, de Little Miss Soccer (1), la situation du foot féminin se résume en une phrase: «il faut faire la révolution»  Pour mener cette révolte, elles sont toutes d’accord sur l’importance de l’éducation, car c’est instruire «la prochaine génération de décideuses/décideurs». Nicole Abar, présidente de Liberté Aux Joueuses et responsable de la mise en place des ABCD de l’égalité (2), voit dans l’éducation des tout.es petit.es le moyen «d’aller à la racine du mal.» Si les inégalités touchent particulièrement les joueuses, «hommes et femmes sont victimes des clichés, on a fait de la différence sexués, la norme» déplore Mélina Boetti, ancienne joueuse. 

 «Les joueuses ont peur d’être punies»

Le manque d’engagement de la part des joueuses professionnelles est souvent pointé du doigt. Mais alors pourquoi ont-elles peur d’élever la voix et comment leur enlever cette angoisse? C’est la question que pose Marine Rome, militante chez les Dégommeuses. Nicole Abar, affirme qu’il faut être tolérante avec elles, car ce n’est pas si simple: «j’ai, moi-même, été en quelque sorte pénalisée après avoir fait sanctionner un club pour discriminations sexistes, à la suite de cette affaire, tout est devenue plus compliqué» explique-t-elle. Si les joueuses préfèrent ne pas se lancer dans de grands discours c’est parce qu’elles ont «peur d’être punies» insiste Nicole Abar. Pour autant il apparaît comme nécessaire « de prendre la parole, quand on en a la possibilité, pour celles.ceux qui ne sont pas représenté.es ».  Les passionné.es de football applaudissent également le boycott de la coupe du monde par Ada Hegerberg, détentrice du ballon d’or de 2018, qui réclame l’égalité avec les joueurs masculins, pour elles «c’est la fédération norvégienne qui se punit, pas Ada Hugerberg». La joueuse est pourtant la mieux payée dans le football féminin, ce qui ne l’empêche pas de toucher 100 fois moins que Neymar, joueur avec le plus gros salaire de Ligue 1.

Pour permettre aux footballeuses de prendre la parole et d’oser réclamer des améliorations, Candice Prévost évoque la nécessité de «les soutenir, remplir les stades, leur montrer qu’elles sont légitimes d’être là.» Pour cette ancienne joueuse «médias, institutions et supportrices/supporters ont un rôle à jouer.» 

Les Françaises ont tout le soutien des Dégommeuses et de leurs allié.es.

 

Louna Galtier, 50-50 Magazine

(1) Un documentaire pour faire « le tour du monde des femmes qui font le foot », voir plus Little Miss Soccer

(2) Les ABCD de l’égalité est un programme lancé en 2013 par Najat Vallaud-Belkacem pour lutter contre le sexisme dans l’enseignement avec pour chargée de mission nationale, Nicole Abar.  Face aux opposant.es, qui parlaient de « théorie du genre », ce magnifique programme ne fut jamais appliqué !

Si vous souhaitez rejoindre l’équipe des Dégommeuses et participer aux entraînements il faudra attendre le mois de septembre car l’équipe est déjà au complet cette année. 

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