Articles récents \ Monde \ Europe Gwendoline Lefebvre: « le Lobby Européen des Femmes, demande une réelle parité entre femmes/hommes dans toutes les structures décisionnelles et les hautes fonctions de l’Union Européenne »

Gwendoline Lefebvre a été élue Présidente du Lobby Européen des Femmes (LEF) en juin 2018. Elle est membre du CA du LEF depuis 2016 où elle représente la Coordination Française du Lobby Européen des Femme (CLEF). Créé en 1990 avec pour objectif d’informer les associations féminines et d’influencer les institutions européennes en faveur des droits des femmes, le LEF est la plus grande coalition d’organisations de femmes d’Europe. Membre de la Direction nationale de Femmes Solidaires, Gwendoline Lefebvre est aussi adjointe au Maire du 9ème arrondissement de Lyon déléguée à l’égalité femmes-hommes. A quelques jours des élections européennes, nous lui avons posé des questions sur l’enjeu des élections européennes pour l’égalité entre les femmes et les hommes.

Quelles sont, pour vous, les priorités pour une réelle mise en œuvre de l’égalité femmes/hommes dans le processus décisionnel politique ?

Il est tout d’abord important de rappeler que les femmes et les filles représentent la moitié de la population européenne ; nous ne sommes pas une minorité. Pourtant, nous ne sommes pas suffisamment représentées dans les instances européennes : 36% des membres du Parlement Européen sortant sont des femmes, 9 femmes figurent parmi les 28 Commissaires Européen.nes ; c’est trop peu et c’est surtout injuste.

Le Lobby Européen des Femmes, demande une réelle parité entre femmes/hommes dans toutes les structures décisionnelles et les hautes fonctions de l’Union Européenne. Cela passe, par exemple, par la mise en place de quotas dans les listes présentées par les partis politiques aux élections européennes, comme c’est le cas en France et dans 8 autres pays.

Mais il est important d’aller plus loin avec notamment la mise en place d’une stratégie politique d’ampleur de l’Union Européenne en faveur de l’égalité femmes/hommes lors du mandat 2019-2024 et la nomination d’un.e Commissaire Europén.ne ayant pour unique mission les droits des femmes et l’égalité femmes/hommes.

Rappelons que l’égalité entre les femmes et les hommes est l’une des valeurs fondamentales de l’Union, il est temps que cela se reflète vraiment dans ses institutions et son fonctionnement.

Que doivent faire l’Europe et les Etats membres pour atteindre une Europe qui garantisse l’indépendance économique des femmes ?

L’écart moyen de rémunération entre les femmes et les hommes en Europe est actuellement de 16%, celui des pensions de retraite atteint en moyenne 40%, il reste donc du chemin à parcourir ! Nous proposons que les Etats membres de l’Union Européenne se fixent un objectif annuel de réduction de ces écarts d’au moins 5%.

Nous demandons aussi que des mesures soient prises afin de réduire drastiquement la pauvreté et la précarité des femmes et des filles. Selon l’Institut Européen pour l’égalité entre les femmes et les hommes (EIGE), 17% des femmes de plus de 16 ans vivant en Europe risquent la pauvreté ; ce chiffre s’élève à 33% pour les femmes à la tête d’une famille monoparentale. Il y a urgence.

Vous appelez à un budget européen qui consacre plus de ressources aux droits des femmes. N’est-ce pas une demande vitale alors que les associations, les ministères ont des budgets toujours très faibles ?

Tout à fait. En avril dernier, l’EIGE a annoncé que, d’après ses estimations, seuls 1% des fonds structurels et d’investissement de l’Union Européenne sont consacrés à l’égalité femmes/hommes.

Des discussions sur le futur budget post 2020 sont en cours. Il est primordial que celui-ci contienne des dotations financières beaucoup plus importantes pour la promotion des droits des femmes et de l’égalité femmes/hommes ainsi que pour des programmes en faveur de l’indépendance économique des femmes. L’UE se doit de montrer l’exemple dans ce domaine. Cela passe également par un soutien financier accru et dans la durée aux organisations et aux militant.es travaillant partout en Europe sur ces sujets ; nombre d’entre elles survivent à peine, cela ne peut pas continuer ainsi.

Êtes-vous inquiète de la montée des extrémismes de droite dans la plupart des pays de l’Union Européenne ? N’est-ce pas une menace forte pour les droits des femmes ?

Nous constatons qu’à chaque fois que ces mouvements prennent de l’ampleur voire arrivent au pouvoir, ils s’en prennent aux droits des femmes, le plus souvent à leurs droits sexuels et reproductifs mais pas seulement. L’exemple de certains membres du parti espagnol Vox qui proposaient encore récemment de réduire les budgets des programmes de lutte contre les violences faites aux femmes est très significatif.

Il est donc fondamental que les femmes se mobilisent contre ses mouvements, comme nombre d’entre elles le font déjà. Elles peuvent notamment voter lors des prochaines élections pour le Parlement Européen pour des candidat-es féministes, progressistes, qui s’engagent pour l’égalité entre les femmes et les hommes ; certain-es s’y sont engagé-es en signant l’appel du Lobby Européen des Femmes et en reprenant les propositions que nous faisons dans notre Manifeste pour les élections européennes.

En 2014, 41% des Européennes ont voté pour élire les membres du Parlement Européen, c’est trop peu ! Une autre Europe que celle proposée par ces mouvements rétrogrades et dangereux est possible si les femmes s’unissent et font entendre leur voix, dans la rue comme dans les urnes.

Il existe une liste féministe en France créée par Nathalie Tomasini, l’avocate de Jacqueline Sauvage. Y en a-t-il d’autres en Europe ?

D’après les informations dont nous disposons actuellement, le parti Initiative Féministe devrait présenter des listes en Suède, peut-être en Finlande et au Danemark. Le Women’s Equality Party au Royaume-Uni devrait aussi présenter une liste. Il existe également la plateforme féministe commune pour les élections européennes initiée par Feminists United Network (FUN). Des candidat.es féministes sont également présent.es sur divers listes, partout en Europe.

Le plus important est que le nombre de femmes et le nombre de féministes élu.es au Parlement Européen soit en nette hausse par rapport à 2014.

 

Propos recueillis par Caroline Flepp et Leonor Guegoun 50-50 magazine

 

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