Articles récents \ France \ Politique Justice pour Sarah : «Ensemble, transformons le déni judiciaire en combat politique"
Depuis le début du mois d’avril 2016, Carole-Elicha Giraud, la mère de Sarah retrouvée morte à son domicile, a entamé une grève de la faim pour condamner l’immobilisme de la justice et pour exiger que l’ex-compagnon de sa fille purge sa peine de prison. Une chaîne silencieuse de femmes a lieu aujourd’hui devant le Tribunal de Toulouse en soutien aux proches de Sarah et aux victimes de violences machistes.
Le 28 décembre 2008, alors âgée de 19 ans, Sarah est retrouvée morte chez elle. Elle avait pris une grande dose de médicaments et avait été battue par son compagnon alcoolique, Michael, de 40 coups puis de 20 autres coups post-mortem. L’affaire avait d’abord été classée sans suite. 7 ans après une bataille judiciaire sans merci, Carole et ses proches ont réussi à faire condamner Michael à 3 ans de prison dont 18 mois avec sursis, pour non-assistance à personne en danger et violences sur concubine.
La justice n’a pas été faite pour Sarah, son ex-compagnon violent n’a toujours pas été incarcéré et peut circuler librement.
Deux semaines après que la mère de Sarah ait entamé une grève de la faim, le juge d’application des peines a décidé de mettre Michael sous bracelet électronique, mais ce n’est pas suffisant au regard de la condamnation de prison ferme qui a été décidée en 2015. Face à cette impunité, à l’immobilisme de la justice, et pour soutenir les proches de Sarah et les autres femmes victimes de violences machistes, une pétition a recueilli plus de 55 000 signatures en 4 mois.
Le Collectif Midi-Pyrénées pour les Droits des femmes a publié une lettre ouverte, signée par plusieurs organisations, pour soutenir Carole et ses proches dans leur combat.
Lettre ouverte à Carole Elicha-Giraud
Ensemble, transformons le déni judiciaire en combat politique
Carole,
ton courage, jour après jour,
nuit après nuit,
inlassablement…
Pendant des années,
Tu as tout fait
pour que la mort de ta fille Sarah ne soit pas vaine,
pour que jamais plus une femme ne subisse des coups qui l’entraînent vers la désespérance.
Antigone, tu te lèves contre les lois de la cité,
contre l’aménagement d’un jugement dérisoire (18 mois de prison ferme)
en une peine encore plus dérisoire (le port d’un bracelet électronique !).
Tu n’acceptes pas cet aménagement.
Il te semble, il nous semble
un déni de ta douleur,
un déni du respect dû aux femmes,
une manière de compter leur vie pour rien.
Carole,
par ta persévérance, tu as contribué à lever le silence sur ces pratiques iniques,
non respectueuses des femmes.
Tu es, pour nous, porteuse de colère, d’espoir, de non-renoncement,
Tu es Conscience,
Tu es Résistance,
Tu braves toutes les peurs, toutes nos peurs.
Tu te dresses,
Tu dis Non,
Tu montres avec force le chemin pour que ça change,
pour qu’enfin advienne pour les femmes le « plus jamais ça ».
Nous te disons merci,
merci de nous encourager à réagir,
à ne pas baisser les bras,
à ne pas accepter l’inacceptable.
Nous avons besoin de ta force physique et morale.
Nous avons besoin de ton énergie.
Ce système injuste qui nous bafoue ne doit pas avoir raison de ta santé.
Carole,
à partir d’aujourd’hui,
nous prenons le relais,
nous interrogeons les politiques :
Comment se fait-il qu’à ce jour aucun-e élu-e ne se soit manifesté-e ? Qu’aucun-e ne se soit soucié-e d’accorder son beau discours plein de bonnes intentions à des actes concrets?
Face à la mort d’une femme, le seul port d’un bracelet électronique peut-il constituer une sanction à la hauteur de l’acte commis ?
Tant que des tribunaux continueront à prendre de telles mesures dérisoires, les hommes, la société dans son ensemble, ne continueront-ils pas à banaliser les faits de violence à l’encontre des femmes ?
Luttons pour que la loi soit respectée dans toute sa rigueur et pour que les sanctions prononcées soient effectivement appliquées.
Transportons la bataille sur le plan politique: dénonçons les «manquements» judiciaires.
– Allons à la rencontre de tous nos élu-e-s pour qu’elles-ils soient garant-e-s de l’application de la loi.
– Diffusons largement cette lettre ouverte, au président de la République, au ministre de la Justice, à la ministre des Familles, de l’Enfance et des Droits des femmes, à la ministre de l’Éducation nationale aux associations de défense des droits humains, à la presse, à tous les médias.
Nous attendons un investissement des syndicats, des associations mixtes et non mixtes, tant au niveau local qu’au niveau national, ainsi que l’engagement de chacune et de chacun.
Pour que la Justice soit à la hauteur de sa mission et que la devise de la République ne soit pas vide de sens.
À la mémoire de Sarah, En solidarité avec Carole
Premiers signataires :
Collectif Midi-Pyrénées pour les Droits des femmes, MMDF Midi-Pyrénées, APIAF, Osez le Féminisme, Bagdam Espace lesbien, Sud CT 31, les Chorâleuses, le Cri, Association V.ideaux/Télédebout, l’Union Syndicale Solidaires 31, Sud Santé Sociaux 31, la Commission Femmes Fédérale de Sud Santé Sociaux, ASSO (Action des Salarié-e-s du Secteur assOciatif), Attac, Du Côté des femmes de Haute-Garonne. Et des individues, nombreuses.
Si vous désirez les rejoindre : cmpdf31@gmail.com
Dernière minute :
Carole vient d’annoncer qu’elle arrêtait sa grève de la faim.
Elle a reçu une lettre de François Hollande. Mais rappelons que les associations qui la soutiennent ont demandé à 4 reprises un rendez-vous au procureur. Elles attendent toujours sa réponse !!!
Elle sera reçue à Paris le 18 mai par Danielle Bousquet, présidente du Haut Conseil à l’Egalité f/h.
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