Articles récents \ Culture \ Cinéma "Merci Patron", entre fable contemporaine et documentaire foutraque, un grand moment de jubilation à ne pas manquer !
Fondateur du journal Fakir, François Ruffin a réalisé un film « artisanal » qui suit le combat qu’il mène avec Jocelyne et Serge Klur afin de les aider à retrouver leur dignité, mise à mal par la fermeture de leur usine textile suite à son rachat par Bernard Arnault, qui démantèlera ce qui restait de l’ancienne société Boussac.
A la suite de la fermeture de leur usine, Jocelyne et Serge Klur, un couple modeste ne réussira pas à retrouver de travail dans une région sinistrée. Ces centaines de milliers d’ouvrier-e-s peu qualifié-e-s, ou dont la qualification n’est plus demandée sur la marché du travail français, ont été sacrifié-e-s aux intérêts des grands groupes industriels qui ont laissé à l’État le soin de financer à minima la survie de ces individus brisés.
Lourdement endettés, nos deux protagonistes risquent la saisie de leur maison, à laquelle ils ont consacré des années de travaux. Leur sort résultant de la casse industrielle de tout le secteur textile de la région, ils décident, avec notre Robin des Bois Picard, François Ruffin, de demander à Bernard Arnault, à l’origine de leurs licenciements, de leur venir en aide pour démontrer son humanité… Les péripéties qui suivent nous démontrent la rouerie d’un magnat qui ne craint rien tant qu’une opinion publique défavorable à sa florissante industrie du luxe.
La « crise » est organisée pour museler et paralyser les classes populaires mises en concurrence et conserver un réservoir de main d’œuvre docile et peu revendicative, hypnotisée par les lumières de la ville et la futilité tapageuse érigée en mode de vie de certains. Les gueux ne doivent pas venir perturber l’ordonnancement somptueux du rendez-vous annuel des actionnaires de LVMH au Carrousel du Louvre, comme l’équipe de Fakir l’a fait en 2013. Pour cela, Bernard Arnault est prêt à jeter quelques miettes aux pauvres afin d’éloigner les projecteurs des médias critiques, en particulier de Fakir dont il craint les attaques. D’ailleurs un service d’ordre musclé garantira l’AG suivante dont l’accès se fait sous la protection d’un cordon de CRS !
Les chiens de garde du pouvoir préservent la tranquillité des riches des revendications malvenues de cette bande de joyeux trublions qui se révèleront plus malins et sauveront de la misère et du déshonneur notre couple de picards.
Un film drôle, salutaire et combatif, à voir en famille ou entre ami-e-s pour bien comprendre que la lutte des classes n’est pas finie et que l’état du droit du travail en est un indicateur précis, précieux et incontournable…
Les femmes ont toute leur place dans ces luttes collectives pour le droit à une vie digne pour toutes et tous, au travail et dans la vie quotidienne. Non seulement parce que leurs salaires restent trop souvent inférieurs à ceux des hommes pour des tâches équivalentes, et donc leurs prestations de chômage et de retraite, parce qu’elles représentent 95% des foyers « monoparentaux » et 70% des pauvres, mais aussi pour prendre leur part de citoyennes dans la construction d’un monde où l’émancipation des femmes deviendra enfin une réalité pour toutes.
Une émancipation qui passe par une éducation de qualité pour toutes et par un travail dont la rémunération permet l’autonomie de chacune !
Le groupe LVMH
Ne s’intéressant qu’aux activités de la marque de luxe Christian Dior, après le rachat de Boussac Saint-Frères, Bernard Arnault liquidera tous les autres secteurs du groupe. Plus tard il délocalisera en Pologne d’abord, puis en Bulgarie, la fabrication des costumes Kenzo. Mais pour un costume vendu 1 000 €, 30 € de frais de main d’œuvre sont encore trop pour ces saigneurs du CAC 40 qui visent des profits toujours plus importants pour leurs actionnaires, aussi envisagent-ils une nouvelle délocalisation en Grèce où le taux de chômage et la misère qui s’y développent peuvent leur faire espérer une main d’œuvre encore meilleur marché et plus docile.
Entre 1987, date de la création du groupe, et 2014, LVMH verra ses gains multipliés par 20, dans le même temps c’est par 15 que se multipliera le nombre de repas servis par les restaus du cœur. L’expansion du luxe suit celle de la paupérisation d’une partie de la classe ouvrière privée de travail et de ressources. Le groupe LVMH qui réunit plus de 70 marques est le seul acteur présent simultanément dans cinq secteurs majeurs du luxe : Vins & Spiritueux, Mode & Maroquinerie, Parfums & Cosmétiques, Montres & Joaillerie et Distribution sélective. Il compte aujourd’hui plus de 120 000 collaborateurs à travers le monde et a réalisé en 2015 des ventes pour un montant de 35,7 milliards d’euros (dont 19% de marge opérationnelle).
Marie-Hélène Le Ny 50-50 magazine