Non classé Les femmes à l’assaut de l’économie !

L'économiste indienne Gita Sen, lors de la session d'ouverture du Forum Awid le 19 avril. © Rosie Westerveld

 L'économiste indienne Gita Sen, lors de la session d'ouverture du Forum Awid le 19 avril. © Rosie Westerveld

L’économiste indienne Gita Sen, lors de la session d’ouverture du Forum Awid le 19 avril. © Rosie Westerveld

Ce 19 avril, le soleil a remplacé les nuages sur Istanbul. Mais les 3 000 militantes – et quelques hommes – du monde entier qui participent au forum de l’Awid (Association pour les droits des femmes et le développement) s’en soucient peu. Elles sont ensemble pour discuter du pouvoir économique des femmes et questionner le développement tel qu’il a été envisagé depuis plus de trente ans. Dans leur assemblée vivante et passionnée où saris et pagnes africains côtoient foulards musulmans et jeans, l’enthousiasme est commun : faire avancer les droits des femmes.

Créée en 1982, l’Awid réunit ainsi tous les trois ans des milliers de femmes de la planète qui, sur le terrain comme dans les organismes internationaux, luttent pour donner du pouvoir aux femmes et mettre fin aux violences qu’elles subissent. Après les conférences des Nations unies consacrées aux femmes jusqu’en 1995, c’est aujourd’hui l’unique occasion pour ces activistes de mettre en commun leurs expériences et leurs idées pour le changement.

Il s’agit aujourd’hui, comme le souligne avec vivacité la présidente de l’Awid, la Libanaise Lina Abu Habib, de « construire des réseaux, de se former en économie, et surtout de prendre enfin l’initiative au lieu de toujours subir ! ». Faisant référence aux révolutions arabes, elle ajoute : « Si les temps sont dangereux pour les femmes, ce n’est pas une raison pour perdre espoir !»

Bref, il faut mettre en marche les imaginations pour briser un ordre économique mondial dans lequel les femmes souffrent de plus en plus : accroissement global des inégalités, travail domestique non rémunéré, salaires précaires et attaques contre les droits fondamentaux.

Mais comment instaurer une économie féministe ? Un modèle de société qui mettrait l’humain et le bien-être au cœur de son projet, loin, très loin du capitalisme compétitif dont la crise a révélé les innombrables failles ?

A l’ouverture du forum, malgré la joie d’être ensemble, le ton était grave. Pour la Latino-Américaine Lidia Alpizar Duran, si les pouvoirs économiques actuels disent prendre en compte les femmes, « ils ne font que les instrumentaliser, en les intégrant au système libéral ».

Tout aussi convaincues qu’un autre monde est possible, et empruntant parfois les accents ultra-gauchistes d’un forum social mondial, les participantes à la réunion de l’Awid le proclament : c’est bien le système lui-même qu’il faut changer.

Comment sinon en utilisant cette « Internationale féministe » qu’Istanbul accueille aujourd’hui ! En mettant l’accent sur le travail de soin fourni par les femmes, trop souvent négligé par les politiques économiques de croissance, en s’interrogeant sur une alternative aux modèles actuels de développement, mais en abordant aussi des sujets plus délicats que sont le fondamentalismes religieux ou le travail du sexe, ce forum international espère donc, une fois de plus, montrer qu’on peut compter sur les femmes pour inventer l’avenir.

Moïra Sauvage – EGALITE

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