Sport Mêmes mêlées, mêmes placages… le rugby féminin reste pourtant peu médiatisé

Clémence Ollivier, capitaine de l'équipe Stade Rennais Rugby

Le Tournoi des 6 nations vient de s’achever. On sait que les Bleus ont été classé deuxième, avec quelques questions sur l’avenir de l’équipe et la retraite envisagée pour plusieurs joueurs. Mais que sait-on des Bleues ?

Pourtant, elles sont arrivées elles aussi deuxième après l’Angleterre dans ce tournoi dont la particularité est de proposer les compétitions en parallèle : d’un côté, les filles et de l’autre, les garçons. Malheureusement, les caméras et les micros des journalistes s’orientent toujours du même côté !

Petite, elle jouait au rugby avec ses frères par plaisir. A 26 ans, Clémence Ollivier est aujourd’hui capitaine de l’équipe féminine du Stade Rennais Rugby (SRR) et a déjà vécu deux coupes du monde avec l’équipe des Bleu-e-s. Elle le reconnaît : dans cette culture très masculine, il faudra du temps pour faire accepter que ce sport se décline aussi au féminin. Pourtant, elle salue des avancées intéressantes.

« Pendant le Tournoi, les filles ne jouent pas dans les grands stades »

Elle qui a été internationale de France raconte : « Les mentalités évoluent lentement, mais elles évoluent. De plus en plus, les équipes féminines ont des staffs structurés, formés, qualifiés. Les périodes de stages et d’entraînement de l’équipe de France ont lieu à Marcoussis, au centre d’entraînement national, avec les mêmes « droits » que l’équipe masculine. Au Tournoi des 6 nations, les filles jouent les mêmes matches que les garçons, aux mêmes dates, aux mêmes horaires, sauf qu’elles ne jouent pas dans les grands stades ! »

Cette année, Clémence a décliné l’invitation de participer aux sélections pour la composition de l’équipe de France présente au Tournoi. Elle est engagée dans une formation professionnelle qui ne lui aurait pas permis de s’entraîner suffisamment ni d’être disponible aux dates des matches. « On est amateurs, dit-elle. Il faut faire des choix. »

Sa passion pour le ballon ovale, elle la vit entre Rennes – dans l’équipe du SRR – et Vannes où elle est depuis quatre ans responsable d’une association sportive auprès de déficients intellectuels et psychiques. Chaque semaine, la jeune femme n’hésite pas à faire les 110 km qui séparent les deux villes pour participer aux entraînements le jeudi soir et aux matchs le week-end.

« Un jeu plus stratégique »

Si elle reste très attachée à cette équipe rennaise avec laquelle elle a découvert le rugby durant ses années d’université, elle constate aussi que la capitale du Morbihan ne dispose pas d’une équipe féminine à son niveau.

Pourtant, ce sport que Clémence a découvert après quinze ans de gymnastique aux agrès, connaît aujourd’hui un beau développement chez les femmes. Pour elle, c’est un sport qui permet « de trouver sa place même à quelqu’un qui n’est pas à l’aise avec son corps dans d’autres activités ». A condition bien sûr « d’avoir une notion du collectif »

Et la Fédération française de Rugby ne s’y trompe pas en acceptant des nombres réduits de joueuses (douze parfois même sept) pour favoriser la création d’équipes.

Pour les filles, les règles du jeu sont identiques à celles des garçons. Le ballon, aussi ; ce qui est rare en sport collectif. Néanmoins, la façon de jouer n’est pas tout à fait la même. « C’est un jeu un peu plus stratégique, on joue plus sur l’évitement, analyse Clémence. Mêmes mêlées, mêmes placages, mais on ne développe finalement pas tout à fait le même jeu, parce que chez les femmes, il y a moins de différences de gabarits. On a peu de filles qui font 110 kilos et plus d’1,80 m ! Certaines ne pèsent que 50 kilos mais par leur énergie, par leur analyse du jeu, par leur vitesse de course, elles tirent largement leur épingle du jeu ! »

« Je comprends qu’on s’étonne que des filles veuillent jouer au rugby », reconnaît Clémence, qui dénonce une méconnaissance de ce sport au féminin due largement au manque de médiatisation. « C’est un cercle vicieux, dit-elle. On a moins de licenciées, moins de retombées financières, moins de retombées médiatiques. »

Résultat, les filles jouent au rugby par plaisir et pour les cercles proches. « Ca reste encore très familial autour du stade ! », s’amuse Clémence, évoquant les parents, les frères et sœurs, les ami(e)s qui sont les seuls à remplir les tribunes.

Geneviève Roy – EGALITE

print