Santé Mères porteuses : les utérus indiens sont les moins chers du monde…

Louer son utérus au sud pour envoyer ses filles à l’école ou payer les dettes de son mari ? Rien de plus facile grâce à la technique, l’argent et la bonne conscience des couples du nord.

En Inde, des centaines de cliniques proposent aux femmes de louer leur utérus. Pour un coût infiniment inférieur à celui pratiqué aux États-Unis, des couples stériles ou des célibataires financent l’hospitalisation de mères porteuses pendant neuf mois.

Ces mères porteuses sont recrutées parmi des femmes en bonne santé et qui sont déjà mères. Une fois le contrat signé avec les futurs parents, elles n’ont plus le droit ni de regagner leur domicile ni d’avoir des relations sexuelles avec leur mari, et sont séparées de leurs enfants. Elles dorment à une dizaine par chambre, reçoivent une dose quotidienne de fer et sont soumises à un régime très surveillé jusqu’à la naissance du bébé.

Le recours croissant à des mères porteuses en Inde, ainsi qu’en Thaïlande et au Cambodge, est bien évidemment lié à la pauvreté de certains pays qui conduit les femmes à louer leur corps pour survivre. Lors d’interviews réalisées par le chercheur Arlie Hochschild à la clinique d’Akanksha, l’une des mères porteuses a raconté qu’elle avait signé ce contrat pour payer la scolarité de ces filles qui, sans cela, ne pourraient pas être scolarisées ; une autre pour payer les dettes contractées par son mari alcoolique. Les directeurs de la clinique se dédouanent en disant que ces contrats offrent des bénéfices mutuels qui permettent à des couples stériles d’avoir un enfant et à des familles déshéritées de survivre.

Une loi qui ne protégera pas les Indiennes

La gestation pour autrui est possible en Inde car il n’existe pas de législation dans ce domaine. Cela signifie que ces mères porteuses n’ont aucune protection légale. Au cours de la prochaine session parlementaire, les députés vont débattre d’une « Loi sur la reproduction médicalement assistée ». Mais ce projet de loi est loin d’estomper toute inquiétude : il confirme en effet que la mère porteuse est privée de tous ses droits pendant la grossesse, y compris celui d’avorter, au profit des parents génétiques.

Les féministes indiennes dénoncent cette pratique comme une illustration des inégalités entre le nord et le sud : la pauvreté permet d’utiliser les organes reproducteurs de certaines femmes à des fins commerciales et la liberté de choix de ces femmes est illusoire. Plus de la moitié des parents qui ont recours à des mères porteuses indiennes sont des Occidentaux qui profitent de cette pauvreté. Elles dénoncent également le silence qui entoure ces pratiques. Dans la tradition indienne, une femme n’est respectée que si « elle donne un enfant à son époux afin que la virilité et la puissance sexuelle de ce dernier soient prouvées et la filiation poursuivie ». La commission des lois recommande donc aux législateurs indiens d’interdire la gestation pour autrui à des fins commerciales et de la cantonner à des « arrangements altruistes » ne faisant pas intervenir l’argent. Mais les différences économiques entre pays riches et pays pauvres et les millions d’utérus qui s’offrent à des prix imbattables rendent le vote de cette loi fort peu probable : la course aux utérus les moins chers ne fera que continuer.

Aux féministes du monde entier de faire entendre leurs voix pour lutter contre ces pratiques liées aux traditions patriarcales et aux inégalités nord/sud !

Danielle Michel-Chich ÉGALITÉ

source : Women’s Media Center

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