Articles récents \ France \ Société EgaliJouets : une démarche en direction des professionnel-le-s de la petite enfance pour un accès plus égalitaire des filles et des garçons aux jouets.
Egaligone, est un institut lyonnais qui encourage l’éducation égalitaire des filles et des garçons dès le plus jeune âge. Explications de Florence Françon, membre d’Egaligone et intervenante dans le cadre d’EgaliJouets.
Pourquoi avoir créé la démarche EgaliJouets ?
C’est tout d’abord la concrétisation d’une réflexion commune, au sein d’Egaligone, sur l’accès des enfants aux jouets et objets du jeu qui est généralement fortement genré – comme en témoignent les catalogues ou publicités très fréquents en cette période de Noël. Puis, l’opportunité de développer un projet spécifique à cette thématique s’est présentée, en 2012, grâce à l’initiative d’une étudiante en Master 2 Métiers de l’Education et de la Culture, réalisant un stage auprès de l’Institut EgaliGone.
Une collaboration a alors été amorcée avec des professionnel-le-s de l’éducation, de la petite enfance et des métiers du jeu et du jouet pour construire l’outil.
En quoi consiste la démarche Egalijouets ?
L’objectif est de proposer une réflexion à la fois individuelle et collective sur la façon dont la présentation des objets du jeu, mais aussi le cadre ou les interactions peuvent être porteurs d’une connotation genrée des jouets auprès des enfants. Il est donc proposé de remplir une grille d’auto-positionnement pour se situer dans ces réflexions, mais le but n’est jamais d’apporter un jugement quant aux pratiques et représentations, ni de fournir des solutions toutes faites.
Il s’agit simplement d’accompagner cette démarche, réalisée en diverses étapes réparties sur plusieurs semaines, en proposant tout d’abord de réfléchir aux intérêts que peut représenter la garantie d’un accès plus égalitaire des petites filles et des petits garçons à tous les types de jeux ou jouets, en particulier sur le développement de leurs compétences. A l’issue de toutes les étapes, quelques préconisations sont proposées, mais toujours de façon adaptée et cohérente par rapport aux constats et aux intérêts ayant émergé dans le groupe.
A qui s’adresse cet outil ?
EgaliJouets est destiné à tou-te-s les professionnel-le-s de la petite enfance, quels que soient leur fonction et leur statut. Nous avons donc accompagné aussi bien des assistantes maternelles, travaillant à domicile et regroupées au sein d’un RAM (Relais d’Assistant.e.s Maternel-le-s), que des personnel-le-s de crèche (auxiliaires de puériculture, éducatrices de jeunes enfants), ou encore des animateur-rice-s d’accueils de loisirs ou d’accueils périscolaires travaillant auprès d’enfants âgé-e-s de trois à six ans.
L’intérêt de cette démarche est également d’intégrer les personnel-le-s de direction dans ces réflexions collectives et individuelles afin de susciter une dynamique de groupe et bien sûr, de garantir la cohérence de cette initiative.
Comment réagissent les professionnel-le-s de la petite enfance que vous touchez ?
Généralement, cette initiative est plutôt bien accueillie dans les structures car elle permet d’ouvrir un espace de réflexions, d’échanges, voire de débats sur une thématique qui n’est pas forcément appréhendée habituellement.
Et de façon plus individuelle, tous les types de comportements peuvent apparaître, en commençant par des réactions de surprise et des premières prises de conscience, assez fréquentes lorsqu’on découvre le genre et l’effet de la socialisation différenciée sur l’éducation des filles et des garçons.
Suite à cela, les attitudes peuvent diverger et évoluer tout au long de l’accompagnement : certaines personnes se montrent très réceptives et démontrent des efforts de prise de recul pour s’approprier les apports théorique et les enjeux de la démarche EgaliJouets, alors que d’autres professionnel-le-s, parfois heurté-e-s dans leurs convictions, témoignent de signes de doute ou de résistance quant à l’intérêt de ce projet. Certaines personnes, au contraire, vont même jusqu’à mener une réflexion sur leurs propres pratiques personnelles et familiales, et nous confier, au fil des étapes, avoir désormais un regard différent sur ces questions jusqu’à modifier certaines de leurs habitudes.
Enfin, quel que soit le degré d’adhésion manifesté à l’égard de la démarche EgaliJouets, les professionnel-le-s paraissent généralement ravi-e-s qu’elle s’appuie autant sur leurs propres connaissances et qu’elle soit l’occasion de valoriser un ensemble de compétences propres au milieu de la petite enfance qui ne sont pas toujours reconnues en tant que telles à l’extérieur, notamment par les familles. Une réflexion plus globale peut alors émerger sur le degré de légitimité conférée à leur posture et à leurs pratiques professionnelles, qui n’est finalement pas si éloignée que cela de nos réflexions initiales sur le genre …
Propos recueillis par Caroline Flepp 50-50 magazine